

By Sara Greem
La première branche du "Mabinogion": la légende galloise de Pwyll, Arawn, Rhiannon et Pryderi
Voici pour les passionnés de mythologie celtique, une première légende de l'Antiquité provenant du pays de Galles, et relatée, dans le "Mabinogion" ou les "Quatre Branches du Mabinogi", qui contient quatre aventures retranscrites, au 14ème siècle. Leur lien avec la mythologie irlandaise demeure irréfutable, car les sujets n'en diffèrent point: la relation entre le druide et le roi, les responsabilités apportées par la Souveraineté, l'existence d'un "Autre Monde" (ou le monde des morts), les guerres, et l'importance du statut d'artisan.
Je vous présente la première légende du "Mabinogion", à travers laquelle vous rencontrerez la déesse Rhiannon ou Rigantona (traduit par "Grande Reine"), qui est apparentée à Epona, la divinité gauloise des chevaux.
Un jour, Pwyll, prince de Dyved, se rendit à Glyn Cuch pour participer à une chasse où il fit preuve d'un grand manque d'honneur, car il s'appropria le cerf tué par le roi d'Annwvyn, du nom d'Arawn qui possédait des chiens d'un blanc pur et des oreilles rouges. Même si ces particularités étaient apparentées à l'Autre Monde, le prince n'en prit cure et s'appropria le butin. Mais Arawn demanda réparation, et proposa à Pwyll de recouvrer son honneur en échangeant son apparence avec la sienne, pendant un an, au terme duquel il serait contraint de combattre son ennemi juré, Hafgan, qui résidait, dans l'Autre Monde. Il fut convenu qu'aucun des deux souverains ne commercerait avec la femme de l'autre, malgré leurs nouvelles apparences. Enfin, Arawn le mit en garde contre son ennemi que les blessures rendaient plus fort, et lui conseilla de le tuer d'un seul coup d'épée.
Pwyll respecta toutes ses promesses, puis il combattit bravement Hafgan qu'il tua d'un seul coup d'épée, et reçut l'hommage des grands guerriers ainsi que la charge de deux royaumes, et fut surnommé "prince d'Annwvyn". Heureux et couvert de gloire, il s'en alla rejoindre Arawn, à Glyn Cuch, puis retrouva son identité, ainsi que ses terres et son épouse qui se plaignait de son manque d'affection à son égard. Le roi, réalisant qu'Arawn ne l'avait pas touchée, il lui révéla, alors, la supercherie. Puis se rendant compte que son royaume avait été administré avec bonté et sagesse, il dévoila la vérité à ses nobles, et garda un lien d'amitié très étroit avec Arawn.
Un soir, après un grand festin qu'il donna, dans son château de Gorsedd Arberth, où un tertre était réputé pour ses puissants pouvoirs magiques, il vit surgir une jeune cavalière vêtue d'or, sur une monture blanche. Il envoya, alors, l'un de ses fidèles pour lui demander qui elle était, mais l'homme à pied ne parvint guère à la rattraper, malgré la lenteur du cheval de la jeune femme. Au troisième jour, Pwyll la poursuivit et lorsqu'il lui somma de s'arrêter, la jeune femme lui obéit, et le souverain s'en éprit. Elle lui dévoila son nom, Rhiannon, fille d'Eveydd le Vieux, et lui expliqua qu'elle était venue l'épouser. Le roi accepta, immédiatement, sa proposition et les noces furent planifiées, l'année suivante.
Le jour du banquet de mariage, un étranger, du nom de Gwawl, demanda une faveur à Pwyll qui l'accepta d'avance, sans en connaître la teneur: il lui réclama son épouse ainsi que des provisions pour ses noces. Or, le souverain ignorait que l'étranger avait été un prétendant que Rhiannon avait éconduit, par le passé. Ne pouvant plus revenir sur sa promesse, Pwyll se résolut à l'honorer, tandis que sa jeune épouse cherchait un stratagème pour éviter de suivre son ancien prétendant.
Le jour où Gwawl vint réclamer son dû, Pwyll surgit avec cent cavaliers à qui il somma de rester cachés, et vêtu comme un mendiant, il demanda à ce que le sac qu'il avait apporté fut rempli de nourriture. Mais comme les aliments ne parvenaient guère à le remplir, il proposa à Gwawl de les tasser avec son pied. Le pauvre bougre tomba, à l'intérieur, et le souverain rusé l'enferma avec un lacet avant de sonner le cor pour appeler ses cavaliers à qui il ordonna de battre le sac. Gwawl demanda grâce, et le souverain, satisfait de la ruse, retrouva Rhiannon au château de Dyved.
Quatre ans plus tard, Pwyll et Rhiannon eurent un fils qui fut enlevé trois nuits après sa naissance. La jeune femme fut accusée d'infanticide par les six nourrices chargées de garder l'enfant, et comme pénitence, on décida qu'elle resterait sept ans, dans la cour d'Arberth près du "montoir des cavaliers" où elle porterait les passants, sur son dos telle une bête de somme, tout en leur contant son histoire.
Entre temps, Teyrnon Twryf Vliant, souverain de Gwent-Is-Coed, se plaignait, car à chaque calende de mai (1er mai), un poulain à peine né disparaissait. Au moment où Pwyll et Rhiannon perdaient leur enfant, Teyrnon surveillait l'une de ses plus belles juments qui mettait bas. Voyant une main gigantesque saisir le poulain et le tirer, par la fenêtre hors de l'écurie, il empoigna son épée et la trancha d'un coup. De retour au château, il trouva un enfant qu'il nomma Gwri Wallt Euryn (traduit par "chevelure dorée"). Le nourrisson grandit très rapidement, et ses compétences furent étonnantes, car à un an, seulement, il en paraissait trois, et à quatre ans, il monta, sur la croupe d'un cheval. Son père adoptif lui fit, alors, don du poulain qu'il avait sauvé, la nuit où il l'avait trouvé. Mais Teyrnon ayant été informé du malheur de Pwyll et Rhiannon, et réalisant que le garçon était certainement leur fils, il décida de se rendre à Aberth aux fins de le restituer. Arrivé au château, Rhiannon lui proposa de le porter, sur son dos, mais Teyrnon refusa catégoriquement. Après le banquet, le souverain raconta son histoire à Pwyll et rendit le garçon à Rhiannon, qui l'appela Prydery (traduit par "souci").
Prydery fut élevé, à Pendaran Dyved, et il épousa Kigva, fille de Gwyn Gloyw. Tout comme son père, il régna avec équité, justice et générosité, et fut très aimé par son peuple.
Avez-vous aimé cette légende ? La deuxième branche du "Mabinogion" suivra, très bientôt…